Sami : « Prendre en compte l’individu et son identité »

Pour inaugurer cette série de portraits de bénéficiaires d’Univ’R44, nous avons eu le plaisir, au début de l’été, de rencontrer Sami Daoud, un écrivain d’origine kurde installé, avec son fils de quatorze ans, du côté de Nantes depuis juillet 2018.

De la détermination dans le regard. De la détermination et un sourire qui annonce celui qui se dessine sur ses lèvres lorsqu’il vous salue. Echappés du Kurdistan irakien, Sami Daoud et son fils sont arrivés en France en mars 2018. Après un bref passage par Strasbourg puis par Paris, une amie propose à Sami de lui prêter sa maison à Trentemoult, le temps de régulariser leur situation. Loin de la froideur de la capitale, le déménagement dans le village situé sur les rives de la Loire est un bol d’humanité pour le duo. Les habitants sont accueillants, plein d’une bienveillance qui touche Sami au cœur. Son fils se fait de nouveaux amis et comme pour confirmer le présage, un chat se laisse adopter par les Daoud peu de temps après leur installation. Sami sait, alors déjà, qu’il est au bon endroit. Les mois qui suivent lui permettent de trouver un logement, obtenir le statut de réfugié et valider son permis de conduire. C’est au début de l’année 2020, lors d’un trajet en tram qu’il croise un ressortissant syrien. Les deux hommes échangent en arabe. Le Syrien lui parle d’un dispositif qui pourrait lui permettre d’être accompagné pour développer son projet d’écriture en français. De retour chez lui, il s’inscrit à l’une des premières réunions « Pass » d’Univ’R44.

Un fin lettré

Avant son départ pour l’Europe, Sami était directeur d’un établissement culturel. Il travaillait alors en collaboration avec instituts et fondations, organisait des expositions, côtoyait artistes, intellectuels et sociologues. Sami a écrit des ouvrages ainsi que de nombreux articles sur la théorie des arts, la laïcité et la question kurde. C’est un fin lettré ayant gagné une certaine reconnaissance au Moyen-Orient mais qui, ici en France, repart quasiment de zéro.

Sami intègre Univ’R44 juste avant le confinement. Il imagine, au départ, s’inscrire simplement à des cours pour parfaire son français littéraire. Un comble pour un homme qui cite Balzac et Flaubert lorsqu’il s’agit d’illustrer ses propos. Mais il s’avère que l’équipe de l’Université l’accompagne, également, pour ré-écrire son curriculum vitae et le diffuser auprès de différents établissements et institutions culturels afin de recréer son réseau – si essentiel dans son métier – et de déclencher des opportunités. Il obtient un rendez-vous avec une élue de la Mairie qui l’aiguille sur de nombreux contacts de la scène artistique et culturelle nantaise. Même si le confinement ralentit l’élan, Sami continue à faire des points tous les quinze jours avec l’équipe d’Univ’R44. Il participe à plusieurs conférences, en France, à Bâle, ou encore, à Bucarest.

Nous avions déjà croisé Sami lors de la table ronde organisée dans le chantier d’insertion ELI pour la journée mondiale des réfugiés. Son intervention avait été marquante. Il y avait souligné l’importance de ne pas considérer le mot « Réfugié » comme une identité. « C’est un statut, « Réfugié ». Un cadre vide. Même si le fait que nous soyons tous traités de la même manière est, en soi, égalitaire. Ça n’est pas juste pour autant. » Il considère comme essentielle, la prise en compte de l’individu, de ses spécificités, de son histoire et de sa culture. C’est justement ce qui a frappé Sami concernant l’accompagnement délivré par Univ’R44 : une considération de l’individu, en fonction des compétences et surtout de l’identité, de l’histoire et du désir de chacun. Le déménagement en Loire-Atlantique aura définitivement été salutaire pour Sami Daoud et son fils : « J’ai l’impression d’être retourné chez moi, sans y être retourné. » Bonne continuation Sami ! •