Français Langue Étrangère enseigné chez Univ’R 44

A ce jour, ce sont plus de 180 bénéficiaires qui ont pu assister aux cours de FLE (Français Langue Étrangère) mis en place depuis novembre 2019 par Univ’R 44. Sur les 300 réfugiés qui devraient bénéficier du dispositif d’ici la fin du projet, quasiment tous passent par ces cours de français. Ils y étudient les codes, la culture et le vocabulaire en fonction de leur parcours et objectifs afin de s’intégrer au mieux dans la société. Nous avons rencontré deux formateurs du dispositif afin qu’ils nous partagent leur quotidien avec les bénéficiaires.  

Mercedeh Leroux
Mercedeh – formatrice de FLE

Mercedeh est iranienne et parle aussi bien le persan, sa langue natale, que le français. Elle enseigne depuis septembre 2020 le FLE (Français Langue Etrangère) à l’Université de Nantes et intervient sur les cours de français à visée professionnelle dans le cadre d’Univ’R 44. Chaque vendredi matin, pendant trois heures, une douzaine de bénéficiaires niveau post-bac assistent à son cours.

Sami – formateur de FLE

Sami est formateur de FLE chez les Compagnons du Tour de France. Depuis janvier 2020, il consacre 50 % de son temps aux bénéficiaires infra-bac d’Univ’R 44 et le reste de son temps auprès des stagiaires du centre de formation qui ont également besoin de cours de français. Ils sont une dizaine à recevoir son enseignement tous les lundis et jeudis.

Profils des bénéficiaires

Ils ont en moyenne une trentaine d’années et se dirigent vers des domaines de carrières ou formations très variés. On compte parmi eux plus d’hommes que de femmes et ces dernières sont mieux représentées dans les profils post-bac. Ils sont issus de pays divers bien que l’on retrouve principalement des personnes originaires du Soudan, de l’Érythrée, la Syrie ou encore l’Afghanistan.

Les niveaux de français des bénéficiaires sont hétérogènes, allant de A1 à B2. Selon le temps qu’a pris leur demande d’asile à être acceptée et le nombre d’heures gratuites de cours de français dont ils ont pu profiter à l’Ofii (Office Français de l’Immigration et de l’Intégration), ils parlent plus ou moins bien notre langue. Ils détiennent donc tous a minima le niveau A1 mais cela n’est pas suffisant pour concrétiser un projet professionnel. Les cours de FLE visent l’obtention d’un niveau de langue suffisant pour entrer en formation, accéder aux études supérieures ou s’insérer professionnellement. Dès lors, les besoins de chacun varient en fonction de son objectif. Leurs formateurs connaissent donc de manière approfondie les personnalités et projets de tous pour les faire avancer au mieux.

Les méthodes utilisées

Les deux formateurs s’appliquent à transmettre le français et sa culture dans un environnement de confiance où chacun se connait et respecte. A ce titre, Mercedeh explique :

« L’accompagnement est très important. Ils repartent de zéro en France ; ils ont pour beaucoup dû abandonner leur famille. Se sentir écoutés a donc une vraie valeur pour eux. On est toujours là pour les soutenir, ils savent à qui s’adresser et cela leur donne une motivation supplémentaire. Ils me disent aussi qu’ils ont de plus en plus confiance en eux. »

Le parcours de chaque nouveau bénéficiaire démarre généralement avec une évaluation personnelle de 1 à 3 heures pour juger ses besoins et objectifs à atteindre. Le vocabulaire qui lui sera enseigné touchera alors au métier visé, une fois les bases du français acquises.

Pour faciliter la compréhension et l’acquisition du vocabulaire, les formateurs utilisent des images ou vidéos. Il peut leur arriver de recourir à la langue maternelle pour traduire certains mots en cas de blocage, bien que la pratique du français soit privilégiée. Originaire de la Libye, Sami parle couramment arabe et n’hésite donc pas à utiliser sa langue natale, commune à presque tous les bénéficiaires, pour débloquer la communication et l’apprentissage du français. Il parle également un peu d’italien et d’anglais, des langues qui peuvent aussi lui être utiles. Une bonne partie des bénéficiaires sont en effet anglophones et arabophones, certains s’entraident d’ailleurs pour traduire ou enrichir leur vocabulaire.

Les formateurs mettent l’accent sur l’individualisation de l’enseignement et leur implication pour tirer le meilleur de chacun. Etant à l’écoute des bénéficiaires, le programme peut être remodelé en fonction de leurs besoins. Le principal est de rester attentif à la personnalisation des parcours. Sami explique :

« L’apprentissage se fait sur la longueur. Il est primordial de prendre son temps avec chaque personne pour comprendre d’où elle vient et où elle veut aller. »

Même en dehors des heures de cours, les relations entre bénéficiaires et formateurs se poursuivent avec l’envoi de textes ou ressources pédagogiques pour que les bénéficiaires puissent s’entraîner et progresser en autonomie.

Des rythmes divers

Selon l’objectif de chacun (trouver une formation, un emploi, créer une entreprise, etc.) et leur capacité d’apprentissage, la durée des cours de français varie d’un bénéficiaire à l’autre.

Le cours de Mercedeh se divisent en deux parties. D’abord, 1h30 de français niveau A2 puis 1h30 de niveau B1/B2. Bien que la deuxième partie puisse être compliquée à suivre pour les novices, certains assistent aux deux plages horaires dans le but de progresser, même s’ils ne participent pas forcément.

De même pour les bénéficiaires infra-bac, le temps passé aux cours de FLE est très variable d’une personne à l’autre. Environ 15 heures de français sur objectif spécifique leurs sont proposées chaque semaine. Pour certains, il s’agit d’une remise à niveau rapide, pour d’autres le temps d’apprentissage est plus long. Tous ne finissent d’assister aux cours qu’une fois qu’ils atteignent un niveau suffisant et qu’une sortie positive (trouver une formation ou un emploi) est possible.

D’autre part, il est possible que l’urgence financière les pousse à changer leur projet. Stéphanie, coordinatrice des parcours Univ’R PRO post-bac explique à propos des personnes qu’elle accompagne :

« Parfois, ils cessent de venir aux cours, le temps de retrouver une certaine stabilité financière, puis ils reviennent pour atteindre le niveau qui leur permettra de suivre une formation. S’ils peuvent travailler avec un niveau B1, il ne leur permet pas de se lancer dans des études. On a donc un accompagnement perlé, selon les besoins, sur deux ans. »

Ce constat est le même du côté des bénéficiaires de niveau infra-bac.

Quelques souvenirs

Sami et Mercedeh expriment d’une même voix que tous les bénéficiaires sont attachants et touchants, de telle sorte qu’ils parviennent tous à les marquer à leur manière. Sami nous partage :

« J’apprécie beaucoup ceux qui s’accrochent, qui veulent s’en sortir. Tous mes élèves sont égaux à mes yeux. J’ai simplement tendance à pousser encore plus ceux qui donnent de leur personne. »

Il croit en la marge de progression de chacun de ses élèves. Il repense à un jeune, originaire de la Sierra Leone, qui bénéficie des cours de FLE depuis 7 mois environ et qui a eu beaucoup de mal à s’accrocher au début. Aujourd’hui, il est près de trouver un travail et a été choisi pour participer au programme 100 chances 100 emplois en partenariat avec Manpower qui a eu lieu en mai / juin de cette année.

Quant à elle, Mercedeh se rappelle un moment particulièrement riche en émotions qu’elle a vécu avec les bénéficiaires :

« On a fêté l’anniversaire de deux personnes du groupe. Tout le monde était très motivé pour décorer la salle, apporter des gâteaux et cadeaux afin de faire plaisir aux personnes concernées. Il y avait une superbe ambiance et un lien fort qui est important pour travailler au mieux tous ensemble. »

Le plaisir qu’ils partagent dépasse même le cadre des cours puisque Mercedeh nous explique que les bénéficiaires se retrouvent souvent entre eux. Que ce soit le soir pour se voir ou en journée pour faire des sorties culturelles, ils forment une communauté soudée et bienveillante les uns avec les autres. Malgré l’hétérogénéité des profils, on ne peut que se réjouir du respect qui règne au sein du groupe, autour de l’apprentissage d’une même langue.